Le traitement de l’obésité ne se cantonne pas à la nutrition ou la psychiatrie. Depuis une trentaine d’années, la chirurgie a pris une place majeure dans les solutions thérapeutiques proposées à l’obésité morbide. 

Actuellement, 13 % des adultes à travers le monde souffrent d’obésité, soit 3 fois plus qu’en 1975. L’obésité est associée à une augmentation du risque de diabète de type 2, de pathologie cardiovasculaire, de certains cancers et de décès prématurés.

Plus de 250.000 interventions de chirurgie bariatrique sont réalisées chaque année aux Etats-Unis, 60.000 en France et 10.000 en Israël. 

Les indications doivent être bien ciblées. Seuls les patients en obésité morbide, soit un IMC supérieur à 40, ou ceux avec un IMC supérieur à 35 associé à une comorbidité sévère doivent passer par la chirurgie bariatrique.

Les techniques en sont globalement les mêmes : agir sur l’estomac pour obliger le patient obèse à réduire son alimentation.

On oubliera les tentatives des années 70 et 80 avec des fils interdentaires qui maintenaient la bouche en position fermée. (Oui oui, ça a existé). Pratique inutile et interdite depuis longtemps. 

Parmi les patients opérés, la proportion est de 82 % de femmes pour 18% d’hommes. 

Détaillons les techniques d’interventions. 

L’anneau gastrique

Désormais de plus en plus rare voire abandonnée, cette technique consistait à enserrer l’estomac dans un anneau réglable par un accès proche de la peau. 

La lumière gastrique réduite obligeait à une réduction des ingesta.

Cette technique a montré de nombreux problèmes et une récidive de l’obésité quasi systématique à l’ablation de l’anneau. 

On la range dans les archives comme un mauvais souvenir.

Le By-Pass

C’est la technique de référence. Elle consiste à shunter par coelioscopie la quasi-totalité de l’estomac en abouchant la partie supérieure de l’estomac directement au jéjunum. On élimine donc les 9/10ème de l’estomac, le duodénum, première partie de l’intestin grêle, et 50 cm du jéjunum.

On l’appelle également court-circuit gastrique (CCG), « anse en Y » ou Gastric Bypass Roux-en Y (GBRY).

Cette technique associe deux principes : la restriction alimentaire et la malabsorption (à cause de la dérivation bilio-pancréatique).

Elle a deux avantages : elle est réversible (avec une deuxième intervention coelioscopique) et elle privilégie le confort de vie car on peut manger pratiquement de tout  (30 grammes au maximum à chaque repas).

C’est la chirurgie bariatrique la plus répandue.

La Sleeve Gastrectomy

Ou gastroplastie verticale calibrée (GVC).

Effectué par coelioscopie, il s’agit de couper et condamner les 2/3 de l’estomac.

Il s’agit d’une technique de restriction pure. 

Elle est de plus en plus répandue depuis une dizaine d’années, surtout en raison de sa facilité de réalisation. 

La Sleeve donne de bons résultats mais présente des taux d’échecs ou de reprise pondérale à long terme, en particulier pour les patients compulsifs qui dilatent la sleeve avec le temps. 

Eh oui, l’estomac n’est pas un sac. C’est un organe à part entière qui se modifie en fonction de ce que l’on mange. 

Le ballon gastrique

Technique simple réalisée par fibroscopie, elle consiste à installer un ballon dans l’estomac afin qu’il gêne la présence d’aliments en trop grande quantité. 

Elle se rapproche de celle de l’anneau gastrique.

Malheureusement de plus en plus répandue, cette technique doit être proscrite en raison de son inefficacité, ses effets secondaires et la récidive totale de l’obésité après son ablation. 

Les techniques expérimentales.

Il en existe plusieurs :

  • Le switch duodénal et le Scopinaro, qui sont des techniques de malabsorption pure, réservées à des cas très particuliers d’obésité extrême ou de très gros déséquilibres métaboliques.
  • Le SADI (simple anastomose duodéno-iléale). Il s’agit d’une dérivation bilio-pancréatique que l’on effectue en cas d’échec de la sleeve gastrectomie afin d’ajouter une malabsorption par dérivation bilio-pancréatique.
  • L’endobarrier, une chirurgie endoscopique qui déploie une sorte de «chaussette» dans le jéjunum pour gêner l’absorption (uniquement aux USA et plutôt dangereuse).
  • L’embolisation de l’artère gastrique gauche, technique de Radiologie Interventionnelle passant par l’artère fémorale, qui diminue la sécrétion de l’hormone de l’appétit (la Ghréline). En voie d’évaluation, elle apporterait une baisse de 8% du poids sur un an mais sur des parties graisseuses sous-cutanées et pas sur la graisse viscérale.  

Alors… que faut-il choisir ?

Les autres techniques ne valant pas la peine d’être évoquées, les débats sont ouverts entre le By-pass et la Sleeve. 

À quelques nuances près, on retrouve la même efficacité et une tolérance similaire. 

Une étude récente n’a pas observé de différence significative entre les 2 interventions en termes de perte de poids ou de régression de l’IMC. Retour à un IMC de 26 environ (le délai dépend du poids de départ).

De même, les pathologies associées (Diabète, HTA, apnées du sommeil, douleurs ostéo-articulaires…) ont été significativement améliorées de la même façon dans les 2 groupes. À l’exception des taux de cholestérol et de LDL qui sont mieux traités par le By-pass.

Sur le plan psychiatrique, la chirurgie bariatrique n’est pas impliquée dans une majoration du risque de suicide, mais se trouve cependant associée à une augmentation de certains troubles (en particulier les comportements auto-agressifs à type d’automutilation, l’éthylisme et la toxicomanie) et à une utilisation accrue de services psychiatriques. En particulier, la fréquence de l’alcoolisme est considérablement accrue après ce genre de chirurgie. 

Parce que, ne l’oublions pas : Il n’y a pas d’obésité sans trouble du comportement alimentaire, qu’elle soit par compulsion ou hyperphagique. 

Les patients obligés de manger moins ne peuvent plus compenser leur mal-être par une prise alimentaire solide. Ils compensent comme ils peuvent, de façon alimentaire ou non. 

Car attention ! Les chirurgiens le disent eux-mêmes : La chirurgie seule ne fonctionne jamais.

De plus, seulement 6 patients sur 10 bénéficient d’un bilan préopératoire adéquat. 

La prise en charge doit être globale, avant et après intervention, associant des praticiens de nombreuses spécialités : diabétologue et endocrinologue, gastro-entérologue, cardiologue, pneumologue et surtout dentiste, psychiatre, nutritionniste ayant des compétences comportementalistes et coach sportif. 

Le chirurgien n’est là que pour améliorer l’espérance de vie du patient. Aussi étrange que cela puisse paraître, son rôle ne se polarise pas sur la perte de poids. Alors que la demande du patient ne porte souvent que sur cette perte de poids.

Certains chirurgiens refusent même d’opérer les patients qui ne se sentent pas capables d’être suivis à vie.

Au total 

La chirurgie bariatrique ne doit s’adresser qu’à des obésités extrêmes, hors de portée de la nutrition et de la psychiatrie. Mais elle ne saurait être considérée comme un traitement miracle et nécessite quand même une prise en charge d’équipe pré et post opératoires avec un suivi nutritionnel à vie, voire psychiatrique. Indications plus larges, combinaison de deux principes, meilleurs résultats avec le temps, le By-pass semble plus efficace à long terme et plus sûr. En outre, sa réversibilité offre un avantage indéniable.

Article écrit par Dr Alexandre HADDAD